La fabrique des pandémies : Préserver la biodiversité, un impératif pour la santé planétaire

Auteur :   Marie-Dominique Robin
Année :    2021

Résumé de l’ouvrage :

2021, nous sommes encore toutes et tous masqués… la faute au COVID-19, un nouveau coronavirus issu d’un réservoir animal, probablement une chauve-souris, de la région de Wuhan en Chine. Et pourtant comme le démontre Marie-Dominique Robin à travers son enquête et les multiples entretiens menés avec des scientifiques, épidémiologistes, généticiens, virologues, écologues de la santé etc., rien de nouveau dans la connaissance des risques sanitaires liés à l’élevage industriel comme source majeure d’agents pathogènes à potentiel pandémique.
En effet, ces nouvelles maladies infectieuses sont associées en majorité aux interfaces entre animaux domestiques et faune sauvage. Et comme les habitats de la faune sauvage se réduisent comme peau de chagrin, le risque augmente. Le tout combiné à une uniformisation génétique de l’élevage toujours plus sujet aux maladies infectieuses. Sida, syndrome respiratoire aigu (SRAS), fièvres hémorragiques de Congo-Crimée et du virus Ebola, fièvre de Lassa, syndrome respiratoire du Moyen-Orient, Nipah, grippe aviaire H1N1, fièvre de la vallée du Rift, zika, chikungunya, covid-19, toutes ces maladies sont des « zoonoses », c’est-à-dire qu’elles sont transmises par des animaux aux humains. Tous les scientifiques interrogés sont formels : d’autres pandémies vont suivre. Nos territoires, détruits par la déforestation notamment, se transforment alors en « territoires d’émergence ». La déforestation conduit à un point de rupture irréversible dans les écosystèmes qui perturbent radicalement les communautés animales en provoquant l’effondrement de la diversité des espèces animales qui joue le rôle de tampon pour la propagation des agents pathogènes des réactions en cascade. Lesquelles, finalement, affectent l’homme. Tel un maillage fin, tout est lié et interconnecté. Nos modes de vie, de transport, d’élevage sur terre ou en eau douce, etc.
Un constat terrifiant au regard de nos comportements « court-termistes ». Car contrairement à certaines idées, non, déforester pour planter des palmiers à huile ou une autre culture demandée par les marchés financiers n’est pas une bonne opération financière, le coût à payer à moyen therme se révèle malheureusement énorme pour les populations locales. Non, éradiquer toutes les espèces porteuses de virus ou maladies ne serait pas une bonne solution mais favoriserait au contraire une nouvelle accélération de l’effondrement des écosystèmes.
Face à cette connaissance qui « démoralise et marginalise » quoi faire ? Les solutions apparaissent tout au long de l’ouvrage, en contre point aux catastrophes actuelles décrites par les scientifiques : collaboration accrue entre vétérinaires et médecins, conservation des forêts, diminution des inégalités sociales ou des poches de misère, favorisation de la gestion participative avec les communautés locales et des réserves de biosphère, réduction de l’industrialisation de l’élevage, promotion de l’agroécologie, « désilotation » de la science, intégration du savoir des communautés indigènes, soutien aux initiatives citoyennes, etc.
Le Covid-19 n’est qu’un coup de semonce face à l’effondrement en marche, le changement passera par un changement d’échelle et de positionnement et de réglementation politiques.

Points intéressants de l’ouvrage :

Un livre qui se lit tel un documentaire (d’ailleurs, le documentaire est dans les tiroirs). Une richesse de points de vue et d’expertises apportée par la soixante d’experts internationaux interrogés par Marie-Dominique Robin.  Des interviews qui se répondent les unes aux autres et convergent toutes à la fois dans les causes, les constats, les conséquences et les solutions. Un livre extrêmement documenté où des éléments précis et scientifiques apportent des réponses claires à certaines de nos questions. Il y a également dans le livre, des « encarts historiques » qui reviennent sur les grandes pandémies comme le sida, la peste ou encore le « rhume des foins », etc. et qui viennent éclairer notre passé mais aussi désormais notre présent.

Points de vigilance de l’ouvrage :

Un « bon gros bouquin » qui est fidèle aux interviews menées par Marie-Dominique Robin auprès des experts. L’inconvénient, à la lecture, réside peut-être dans sa forme, où il y a peu de respiration. L’écriture est condensée et lourde car même en faisant partie de ce « public averti, conscient et engagé » ; le constat de notre inconscience globale et de ses effets destructeurs fait mal. La citation de Serge Morand résume bien le propos : « Quelle est la différence entre un pessimiste et un optimiste ? Le premier dit : ça ne peut pas être pire ; le second : mais si, ça peut : »